News & Insights > Insights > La fin des cookies tiers sur Chrome – des solutions se mettent en place
 

  •  By Paul Cussac

Après Safari et Firefox, c’est Google qui a annoncé en janvier 2020 la suppression sous deux ans des cookies tiers sur son navigateur Chrome. Après le 1er janvier 2022, près de 9 internautes sur 10 ne seront plus identifiés par les cookies tiers (Le Hub – La Poste). Cette annonce plonge le monde du reciblage publicitaire dans l’incertitude, Google Chrome représentant 64% de part de marché des navigateurs web en février 2021 (Statcounter).

Cette décision s’installe dans une stratégie de protection de la vie privée des utilisateurs sur le web, ainsi qu’une nécessité de se plier aux règlementations toujours plus strictes sur ce sujet, comme le RGPD ou le futur ePrivacy au sein de l’Union Européenne. Ce virage économique et légal s’inscrit logiquement dans cette volonté des utilisateurs d’un respect de leurs droits individuels : 72% des utilisateurs arrêteraient d’acheter un produit ou un service d’une entreprise qui ne garantirait pas le respect de la vie privée (BCG). Cette décision s’aligne également au niveau français avec les nouvelles directives de la CNIL mises en place depuis le 1er avril 2021.

A moins d’un an de la fin de cette période de transition, il nous parait primordial de comprendre les conséquences de ce changement pour les acteurs de la publicité en ligne mais surtout d’évoquer les alternatives, existantes ou en développement, à ces cookies tiers. C’est une immense opportunité pour cette industrie qui voit l’émergence de technologies tout aussi efficaces que les cookies tiers et la possibilité pour les annonceurs et les marques d’assainir leur image auprès des utilisateurs.

Comment identifier et suivre les utilisateurs tout en respectant leur vie privée et les règlementations ?

Pour les éditeurs ou les annonceurs, cette question semble antinomique. Par ailleurs, le cookie tiers était une véritable mine d’or pour la publicité en ligne. D’après Invesp, « les visiteurs de sites web reciblés avec des publicités Display sont 70% plus susceptibles de convertir sur le site Web du retailer ». La disparation des cookies tiers rendra ce reciblage bien plus complexe.

Nous vous présentons aujourd’hui cinq alternatives au cookie tiers avec leurs bénéfices et leurs limites.

 

La Privacy Sandbox de Google sous le feu des critiques

C’est quoi ? C’est la nouvelle interface auprès de laquelle les annonceurs pourront accéder à des informations sur des groupes d’utilisateurs. Google marque le passage du ciblage personnel au ciblage de groupe, organisée en cohorte d’utilisateurs selon leurs affinités : cette technique est appelée Federal Learning of Cohorts (FLoC). Les annonceurs n’ont donc plus accès aux données comportementales individuelles des annonceurs pour les exploiter ou les revendre. Cette Privacy Sandbox permettra toujours le tracking des utilisateurs, le ciblage publicitaire et l’attribution d’une conversion à un site tiers mais avec moins de précision qu’à l’individu.

Les avantages ? Ce projet s’inscrit dans une logique de respect de la vie privée des utilisateurs tout en permettant aux annonceurs d’accéder à la plus grande précision possible afin de proposer du contenu pertinent. L’objectif affiché n’est pas de bouleverser le système mais de le rendre plus sain et respectueux des règlementations en vigueur.

Les limites ? Google se placerait en position de monopole sur la propriété et l’utilisation de ces données si importantes dans le secteur de la publicité en ligne aujourd’hui. C’est pourquoi un groupe de 15 procureurs généraux américains a déposé une plainte antitrust contre Google en décembre 2020 dans laquelle se retrouve la mention de la Privacy Sandbox, accusant Google “de cacher ses véritables intentions” ainsi que de vouloir placer “le navigateur Chrome au centre du suivi et du ciblage” (Siècle digital). Par ailleurs, ces données étant moins précises, le ciblage en pâtira inexorablement. 

 

L’avènement de la donnée 1st party

C’est quoi ? La donnée 1st party correspond à la donnée dont un acteur est propriétaire. Elle regroupe les données générées par l’interaction des utilisateurs avec votre site web ou des données CRM.

Les avantages ? Cette donnée est par nature différenciante (parce qu’elle n’appartient qu’à un acteur), pertinente (générées par l’interaction des clients avec la marque), et de bonne qualité (prélevée à la source). C’est une donnée qui est peu chère et qui permet de rentabiliser les activations marketing.

Les limites ? L’accès à cette donnée est possible seulement s’il y a interaction et consentement éclairé avec les prospects et/ou clients, ce qui n’est pas le cas pour l’industrie de biens de consommation qui sont dépendants de leurs distributeurs. La qualité de la donnée est également soumise à la volonté de l’utilisateur de fournir ses données complètes et correctes. Enfin, l’utilisation de cette donnée 1st party nécessite une collecte centralisée et omni-canal afin d’éviter tout mauvais traitement de la donnée qui pourrait affecter l’efficacité des projets et agacer les propriétaires qui voit leurs données mal utilisées.

 

Les « private gardens »

C’est quoi ? Dérivés des « walled gardens » que sont Facebook ou Google, les « private gardens » sont des écosystèmes technologiques clos appartenant à un acteur indépendant data rich qui met à disposition sa donnée 1st party à des annonceurs et des marques ; pour ces derniers, c’est de la donnée second party. Les « private gardens » sont des espaces de collaboration dans lesquels les clients ont accès de façon transparente à la donnée, à la grande différence des « walled gardens ». Le SafeHeaven de LiveRamp est un exemple de service technologique de « Private garden ».

Les avantages ? Ces écosystèmes technologiques contiennent de la donnée 1st party de grande qualité en nombre quasi illimité. Ils sont également transparents, les annonceurs et les marques peuvent donc analyser et comprendre les points forts et faibles de leurs activations marketing afin d’être toujours plus pertinents pour les utilisateurs. C’est une situation win-win-win : pour les propriétaires de cette donnée qui monétisent cette immense quantité de données jusqu’ici inerte, pour les marques et annonceurs qui ont accès à de la donnée de qualité et qui peuvent être de plus en plus pertinents, et enfin pour les utilisateurs qui reçoivent de la publicité pertinente tout en ayant leur vie privée respectée.

Les limites ? Le principal obstacle aujourd’hui est technologique. Ce sont des structures technologiques complexes qui doivent permettre aux annonceurs et aux marques de se connecter afin d’avoir accès à des segments de données tout en respectant les règlementations liées à la vie privée des utilisateurs. Par ailleurs, peu d’acteurs ont les ressources financières et data pour mettre en place un écosystème utile et rentable, les retailers étant les candidats les plus prometteurs.

 

Le PID, un projet plein de promesses

C’est quoi ? C’est un identifiant unique persistant qui suit l’utilisateur à la trace sur ces différents appareils. L’utilisateur doit y adhérer volontairement. Aujourd’hui, le Project Rearc développé par l’IAB semble être l’un des plus prometteurs.

Les avantages ? Pour l’utilisateur, il permet de se connecter partout de façon sécurisée avec un seul identifiant. Pour les annonceurs, cet identifiant offre un profil complet qui permet de pousser la personnalisation à son paroxysme.

Les limites ? Cette technologie n’est encore qu’au stade de projet. C’est un système extrêmement complexe à mettre en place puisqu’il concerne toutes les parties prenantes du web, ce qui requiert une coopération sans faille.

 

Le ciblage contextuel

C’est quoi ? Il s’agit d’acheter de l’emplacement publicitaire sur des sites dont le contenu est en lien avec une annonce, par exemple une publicité d’une compagnie aérienne sur TripAdvisor. Le ciblage par mots-clés se transforme progressivement en un ciblage sémantique où, grâce au machine learning, des algorithmes de NLP (Natural Language Processing) peuvent comprendre le langage et le ton d’une page ; par exemple, l’intelligence artificielle peut faire la différence entre l’éloge et la critique d’un même sujet.

Les avantages ? Les utilisateurs reçoivent une publicité pertinente dans un moment d’engagement de leur part. En plus de les pousser à répondre à ce stimulus, l’annonceur améliore son image de marque en proposant un contenu pertinent. Par ailleurs, le ciblage contextuel ne se fonde pas sur de la donnée utilisateur, il est donc totalement en ligne avec les nouvelles règlementations.

Les limites ? C’est une alternative probablement moins efficace que l’actuel système des cookies tiers.

 

Le monde sans cookie tiers est pour demain. Les inquiétudes des utilisateurs concernant leur vie privée sont prises en considération et c’est un pas en avant. Comme tout changement, la nouvelle effraie et inquiète les parties prenantes mais cette annonce est un catalyseur pour assainir la publicité en ligne. Cette prise de position de Google peut également mener à une solidarité des acteurs en réponse afin de s’extraire de la mainmise de la firme de Mountain View sur le ciblage publicitaire. Les annonceurs tendront sûrement à étoffer leurs bases de données propriétaires afin de renforcer leur souveraineté data et créer de nouvelles sources de revenus, par exemple à travers la monétisation.

Crédit photo : Daniel ODonnell

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