News & Insights > Insights > Connaissez-vous la recette de la data sans cookie ?

La protection de la vie privée n’a cessé d’évoluer et de se renforcer. En parallèle, l’identification des utilisateurs et de leur comportement sur Internet, sous prétexte de faciliter et de fluidifier l’expérience, tend vers l’ultra-personnalisation, induisant un échange de données controversé.
Internet, ce service gratuit finalement plus cher que prévu pour l’internaute.

L’annonce de Google de supprimer les cookies tiers de Chrome a fait couler beaucoup d’encre, mais cette nouvelle n’est qu’une suite logique à l’ascension hégémonique de Google.

Cependant, le législateur et le citoyen n’ont pas attendu le digital pour se préoccuper de la protection de la vie privée. Déjà en 1974, Georges Pompidou souhaitait lancer le projet SAFARI (Système Automatisé pour les Fichiers Administratifs et le Répertoire des Individus). Ce système prévoyait de créer une base de données centralisée de la population, en utilisant le fichier de sécurité sociale comme identifiant commun à tous les fichiers administratifs. Ce projet fut retiré par le Premier ministre de l’époque Pierre Messmer face à la levée de bouclier des citoyens. Il créa par la suite une commission dite « Informatique et Liberté ».

 “L’informatique doit être au service de chaque citoyen”, proclame la loi du 6 janvier 1978. Dans cet objectif, une Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL) est instituée.

C’est 40 ans plus tard que le RGPD voit le jour, après l’un des plus grands scandales dans le monde du numérique. Le scandale Facebook-Cambridge Analytica, nous questionne sur la possibilité qu’aujourd’hui « chaque citoyen soit au service de l’informatique », après que des données personnelles aient été utilisées au profit d’intérêts privés dans le cadre de l’élection de Donald Trump. 

Le cookie tiers contient des informations personnelles résiduelles qui permettent à des tiers de continuer à suivre le comportement de l’utilisateur

La prise de conscience des internautes sur la valeur de leurs données et le fait qu’elles ne soient pas totalement privées a braqué les projecteurs sur les cookies. Pour rappel, le cookie est un fichier texte enregistré sur l’ordinateur lorsqu’un utilisateur visite une page web. Il en existe deux grandes catégories. Les cookies de sessions permettent au site web d’identifier l’utilisateur au travers des pages, on retrouve cette fonctionnalité dans le cadre d’un panier d’achat sur un site e-commerce par exemple. Les cookies permanents permettent au site de personnaliser et d’optimiser le parcours client, ils restent actifs même après la fermeture d’une session. Parmi les cookies permanents, le cookie tiers contient des informations personnelles résiduelles qui permettent à des tiers de continuer à suivre le comportement de l’utilisateur. Il est installé par des sites visités antérieurement à des fins de personnalisation ou publicitaires, et c’est justement ce dernier qui fait débat aujourd’hui.

Aujourd’hui 70% des Français se disent plus sensibles aux problématiques de protection des données, et 47% des internautes utilisent un Ad Blocker

Depuis l’entrée en vigueur du RGPD, les sites doivent recueillir le consentement des utilisateurs avant le stockage de leurs informations ou pour accéder à des informations déjà stockées. Aujourd’hui 70% des Français se disent plus sensibles aux problématiques de protection des données (Sondage IFOP réalisé en avril 2019 sur un échantillon de 1 000 personnes, représentatif de la population française de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.) et 47% des internautes utilisent un Ad Blocker (GlobalWebIndex).

Le 14 janvier dernier, Google annonçait se donner deux ans pour éradiquer les cookies tiers sur son navigateur pour répondre à des enjeux de privatisation et de sécurité. Safari d’Apple (2017) et Mozilla Firefox l’ont devancé en se dotant de filtres anti-cookies.

Cette course effrénée, que mènent les législateurs pour protéger la vie privée et les acteurs du numérique (marques, logiciels, agences et cabinet de conseil) pour collecter de la donnée qualifiée, conduit ces derniers à repenser leur activité.

 

 

La protection de la vie privée au détriment d’une donnée qualifiée 

Vous avez sûrement déjà entendu cette fameuse citation : « Si c’est gratuit, c’est que vous êtes le produit ».

En effet, lorsque l’on navigue sur Internet, la gratuité du service passe généralement par le partage de données et d’informations à l’attention des publicitaires. Avec l’évolution législative centrée sur le respect de la donnée et de la vie privée, il est donc de plus en plus difficile de récolter de la donnée dites « propre » et exploitable.

Le rapport de force se consolide pour les acteurs GAFA présents dans le quotidien des individus, qui seront bientôt les seuls à obtenir de manière facile, légale et pertinente des données massives de clients.

Avec la décision de Google de rendre obsolètes les cookies tiers de Chrome qui équipe 6 utilisateurs sur 10, et les autres navigateurs déjà engagés dans cette voix, la collecte de données devient plus complexe.

Le rapport de force se consolide pour les acteurs GAFA présents dans le quotidien des individus, qui seront bientôt les seuls à obtenir de manière facile, légale et pertinente des données massives de clients.

Il est toujours possible de récupérer de la donnée, mais cette dernière est de plus en plus limitée par les internautes refusant les cookies sur le site qu’ils consultent ou refusant toute utilisation de leurs données à des fins promotionnelles.

Depuis ces derniers mois, nous mesurons chez nos clients plutôt 40% des internautes qui sont réticents pour partager leurs informations personnelles.

20% environ des internautes interdisent le site de suivre leur parcours à des fins statistiques, ce qui réduit la qualité des données et réduit la précision de certaines variables telles que le taux de rebond. Depuis ces derniers mois, nous mesurons chez nos clients plutôt 40% des internautes qui sont réticents pour partager leurs informations personnelles.

Le seul moyen d’avoir de la donnée fiable est donc de recueillir explicitement le consentement de l’individu. Encore faut-il que ce dernier souhaite avoir des offres et contenus ciblés lors de sa navigation et qu’il fasse confiance au site qu’il consulte.

 

 

Vers un nouveau monde cookie-less

Le marché de la publicité digitale progresse chaque année (+12% en 2019) et atteint les 5 862 milliards d’euros contre 5 228 milliards en 2018 (Observatoire de l’e-pub 2019).

La reconnaissance des internautes est plus que jamais l’enjeu des acteurs du web. Sans cette possibilité de tracer les internautes via les cookies tiers, il est indispensable pour les éditeurs de garder la main sur leurs données propriétaires.

Les éditeurs commencent à se réunir afin de proposer des « comptes communs » permettant d’identifier un utilisateur unique sur plusieurs plateformes. La concurrence devra donc s’effacer au profil de la bonne traçabilité des internautes.

Le PassMedia, développé sous la supervision du Geste (Rassemblement d’éditeurs), a été déployé le 21 janvier 2020 au sein de six sites : le JDD, Paris-Match, 20 Minutes, L’Equipe, Europe 1 et RTL. Ces derniers ont donc maintenant un identifiant commun, ce qui devrait leur permettre de passer d’environ 15% d’utilisateurs logués à 50% d’ici 2021.

Le metered paywall ou le hard paywall, qui restreignent la quasi-totalité ou l’intégralité du contenu pour les internautes non logués, seront une solution efficace pour obliger ces derniers à se connecter et à se lier à un ID unique lors de leur navigation

D’autres alternatives sont utilisées par certains acteurs pour inciter les internautes à se loguer afin de pouvoir suivre leur activité. Le paywall est régulièrement utilisé afin d’obtenir l’ID de l’utilisateur. Le soft paywall, qui consiste à inciter l’internaute à s’identifier ou s’abonner pour lire plus d’un certain nombre d’articles par jour, ne sera plus utilisable sans les cookies permanents. Néanmoins, le metered paywall ou le hard paywall, qui restreignent la quasi-totalité ou l’intégralité du contenu pour les internautes non logués, seront une solution efficace pour obliger ces derniers à se connecter et à se lier à un ID unique lors de leur navigation.

Cette tendance à l’identification pourrait freiner la consultation de certains sites. Les acteurs du web voulant absolument tracer et identifier leurs utilisateurs risquent de les voir abdiquer et partir du site, au prix d’une donnée fiable et précise.

Avec leurs nombreuses plateformes et services, Google et Facebook ont déjà une bonne traçabilité des internautes sans utiliser de cookies tiers. Les autres acteurs du web ont donc tout intérêt à s’armer afin de concurrencer ces géants de la data, qui ont déjà une longueur d’avance avec d’importantes bases de données légalement exploitables.

L’identification des utilisateurs par login se présente alors comme un excellent moyen pour les marques de gagner la confiance des internautes, favoriser le partage consentant de leurs informations et assurer un service personnalisé optimal. Le label digital ad trust a par exemple été adopté par plusieurs grandes entreprises, afin de certifier leur engagement quant au respect de la donnée et aux moyens employés afin d’améliorer sa gestion.

Grâce à des IDs publicitaires mobile ou encore des ID in-app (TV connectée, radio digitale…), les marques initient une stratégie long-terme qui permettra plus de précision et une meilleure collecte des données utilisateurs en passant d’une stratégie cookie-based à une stratégie ID-based.

 

 

Quelle place pour le consultant digital ?

Le consultant digital a un rôle d’information et de conseil auprès de ses clients sur les nouvelles tendances et les points de vigilance à prendre en compte pour rester viable et faire face aux évolutions du marché et de ses acteurs.

Le consultant digital devient ainsi le référent pour accompagner les marques sur le meilleur moyen de collecter et exploiter de la donnée, identifier des segments clients précis et se tourner vers les bonnes solutions pour survivre à la disruption de la publicité digitale.

Alors que l’avenir de la DMP (Data Management Platform) sans cookies est questionné, le consultant digital va également devoir accompagner et suivre les marques dans leur transition vers l’exclusivité de la CDP (Customer Data Platform), qui permet de gérer et de concaténer les données des clients en se basant principalement sur des données propriétaires.

 

 

Conclusion

Comment faire dans ce monde à deux vitesses pour protéger la vie privée des utilisateurs tout en leur proposant du contenu personnalisé, efficace et pertinent, mais gratuit ?

La pression législative sur le respect de la vie privée permet de faire un pas important dans le respect des données en ligne. Toutefois, il est encore nécessaire d’informer et d’éduquer l’utilisateur sur la manière dont ses données sont exploitées et à quelle fin. Les progrès du digital permettent d’améliorer l’expérience utilisateur et de mieux l’accompagner tout au long de son parcours… Encore faut-il que ce dernier ait le choix et soit informé sur l’évolution de ce canal qui occupe une place centrale dans notre quotidien.

Les agences médias et les éditeurs vont devoir redoubler d’efforts afin de réussir à identifier l’utilisateur grâce à la gestion de leur propre data. Les annonceurs, quant à eux, vont devoir définir les stratégies data adéquates et choisir les bons partenaires pour proposer un service personnalisé aux utilisateurs.

La recette de la data sans cookie en 2020 est complexe et de nouveaux challenges sont présentés aux acteurs du web. Les agences médias et les éditeurs vont devoir redoubler d’efforts afin de réussir à identifier l’utilisateur grâce à la gestion de leur propre data. Les annonceurs, quant à eux, vont devoir définir les stratégies data adéquates et choisir les bons partenaires pour proposer un service personnalisé aux utilisateurs.

Le consultant digital, devient le guide indispensable pour accompagner les annonceurs dans ces décisions stratégiques.

L’écosystème numérique est en constante évolution et les marques n’ont pas fini de redéfinir leur business model… À partir du 11 avril 2020, ces dernières ne pourront d’ailleurs plus utiliser l’Audience Network de Facebook (sur Chrome), une fonctionnalité bien pratique qui leur permet de publier des bannières publicitaires sur près de 50 000 applications tierces…

 

…RGPD, ePrivacy, fin des cookies tiers, nouvelles stratégies digitales et nouveaux enjeux :
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Co-auteur : Tanguy Cuesta

Crédit photo : Oleg Magni for Unsplash

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